Alors que l’Etat programme 20 milliards d’euros d’aides aux entreprises dites stratégiques, le collectif « Nous Sommes Demain », qui réunit 400 000 entrepreneurs et emploient 3 millions de salariés, appelle le gouvernement à soutenir une économie plus solidaire, durable et inclusive.

La dynamique est partie il y a déjà deux ans mais le tempo s’accélère pour le Collectif Nous Sommes Demain. « Le Medef n’est pas la seule voix du patronat » s’insurge Caroline Neyron déléguée générale du Mouves, le mouvement des entreprises à impact social et environnemental et membre du collectif.

Si nous n’arrivons pas à orienter maintenant une partie des aides d’Etat vers des entreprises vertueuses, nous n’aurons peut-être plus jamais d’autres occasions avant longtemps.

La fenêtre de tir est en effet étroite d’ici la fin de cette année où il reste encore deux projets de loi de finances rectificatives, deux échéances cruciales à la fin mai et octobre pour diriger au moins 1 des 20 milliards d’euros d’aides d’Etat vers la relance d’une économie plus solidaire, durable et résiliente.

Un autre monde est possible veut croire Pierrick De Ronne, également membre du collectif et président de Biocoop. L’enseigne compte 630 magasins en France, 8 000 salariés, quatre plateformes logistiques et sa propre société de transport. Une entreprise florissante qui réalise 1,3 milliard de chiffre d’affaires et  « pourtant, nous avons d’autres ambitions que de faire du chiffre d’affaires et de verser des dividendes« , assure son président, très agacé par les dernières déclarations du patron du Medef qui souhaite un moratoire sur les normes écologiques imposées aux entreprises. Pour lui, bien au contraire, l’enjeu est d’aller plus loin en incitant les entreprises à s’engager sur des critères sociaux et environnementaux.

Vers une économie plus juste

Le collectif « Nous Sommes Demain » propose une dizaine de mesures à mettre en place. Parmi elles, on trouve un écart maximum d’un facteur 10 entre le plus haut et le plus bas revenu dans l’entreprise, un minimum de 25 % de placements de l’entreprise réalisés dans des fonds responsables, un score de plus de 90 à l’index égalité femmes-hommes ou encore une gouvernance mieux partagée avec les salariés.

Pierrick de Ronne, président de Biocoop
Pierrick de Ronne, président de Biocoop

« Les entreprises ont aussi des comptes à rendre à la société » assure Pierrick de Ronne, à la tête d’une entreprise qui a inscrit depuis longtemps la plupart de ces indicateurs dans ses statuts. Chez Biocoop, autant de femmes que d’hommes siègent au conseil d’administration, l’écart des salaires est limité de 1 à 5 dans les magasins, 1 à 10 au niveau du groupe, aucune bouteille en plastique n’est mise en vente dans les rayons, aucune marchandise n’a été transportée par avion, 80% de l’offre est française et 15% est ultra locale, enfin la gouvernance est ouverte aux salariés à hauteur de 5% leur permettant ainsi de participer aux décisions et à la stratégie du groupe.

Peut-être sommes-nous moins fructueux quand la croissance est forte mais tellement plus résistants en temps de crise, se réjouit-il.

Pendant le confinement, Biocoop a enregistré 25% de chiffre d’affaires supplémentaire qu’elle va redistribuer pour partie en primes à ses salariés exposés aux risques, une autre partie sera injectée dans la société d’investissement du groupe Défibio qui aide aux financements de projets éthiques.

Le pari de la transition

Toute la jeune génération est en quête de sens assure-t-on chez Phenix, où l’on tient le pari que le mouvement de transition va s’accélérer. Son co-fondateur, Jean Moreau, a fait de la lutte contre le gaspillage alimentaire son métier. Phenix est une plateforme web et une application qui gère la fin de vie des invendus. Ils sont récupérés auprès des grandes surfaces et des restaurants pour être proposés à prix cassés aux particuliers, ce qui ne trouve pas preneurs est ensuite donné aux associations caritatives. 120 000 repas sont ainsi chaque jour sauvés de la poubelle. Crée en 2014, Phenix a pu en 5 ans ouvrir 20 antennes régionales. Entreprise sociale construite sur un modèle autonome, Phenix affiche 15 millions d’euros de chiffre d’affaires et emploie 160 salariés.

Jean Moreau, co-fondateur de Phenix ( 2nd en partant de la droite )
Les équipes Phenix accompagnent les magasins dans leur démarche anti-gaspi

La période de confinement avec la fermeture des restaurants et la baisse de consommation n’a pas été une période simple à gérer. « C’est là que l’on a pu tester la résilience de notre entreprise » explique Jean Moreau. Comme toute entreprise à impact social, Phenix inclue ses salariés dans ses prises de décisions : « Ils ont souhaité par exemple que la chaîne de solidarité envers les associations caritatives soit prise à nos frais ou encore que l’application soit gratuite pour les restaurateurs qui se retrouvaient avec toutes leurs marchandises sur les bras. » Conséquences directes : une partie des salariés a dû être mise au chômage partiel et le plan de développement de l’entreprise est gelé pour cette année.

On sait que cela prendra un peu de temps pour se relancer mais nous avons confiance, notre modèle est résistant, nous sommes dans le sens de l’histoire, assure Jean Moreau.

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