L’interdiction de destruction des invendus non alimentaires neufs et l’obligation de leur gestion et “réemploi”, notamment via le don, sont entrées en vigueur le 1er janvier 2022 pour les produits déjà couverts par une filière à Responsabilité Elargie du Producteur (REP). Cela concerne par exemple les textiles 🧥, les matelas et meubles 🛋, les équipements électriques et électroniques ou encore les produits d’hygiène sous statut cosmétique et les livres et fournitures scolaires 📖. Toutes les autres filières seront, quant à elles, concernées par cette obligation au plus tard le 31 décembre 2023.

Mais que signifie concrètement la loi AGEC pour les professionnels qui détiennent des stocks d’invendus non alimentaires ? Quels sont les produits concernés par ce texte ? Quand entre-t-il en vigueur selon les différentes industries concernées ? En quoi consiste la fameuse obligation de réemploi qui est au cœur de la loi AGEC ? À quelles sanctions s’exposent ceux qui ne respectent pas cette nouvelle loi ?

La loi AGEC en 2023

Le 10 février dernier, dans un communiqué officiel du Ministère de la Transition Écologique, le gouvernement se félicitait, trois ans après la parution de la loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire, que ce texte avait « considérablement accéléré le changement de notre modèle de production et de consommation » et apporté « des réponses aux attentes des Français en matière d’écologie à travers des mesures de la vie quotidienne, grâce à une écologie du concret préservant les ressources et le pouvoir d’achat ».

Encouragés par le vote de la loi AGEC dès 2020, les professionnels du secteur ont eu plusieurs mois pour s’organiser afin de respecter l’obligation de ne plus jeter en décharge ou incinérer les surplus non alimentaires. Cela est d’autant plus logique que les déchets représentent un coût pour les producteurs de déchets, et que ce coût ne cesse d’augmenter. En effet, le législateur prévoit une augmentation constante de la Taxe Générale sur les Activités Polluantes (TGAP) dans les prochaines années. Cette taxe est répercutée par les prestataires déchets sur la facture déchets qu’ils adressent aux producteurs de déchets. Celle-ci est proportionnelle au volume de déchets collectés et traités, selon un principe de pollueur-payeur. Le professionnel qui mettrait ses invendus en destruction plutôt que de les valoriser serait donc perdant.

D’un autre côté, la loi Aillagon (août 2003) donne droit à une réduction d’impôts, de l’ordre de 60% de la valeur d’achat des produits, en cas de don des invendus alimentaires et non alimentaires à une association caritative venant en aide aux plus démunis.

Ce contexte est donc doublement favorable à l’implémentation de solutions de valorisation des invendus non alimentaires : d’une part, les jeter coûte de plus en plus cher alors même qu’organiser leur don est fiscalement intéressant, d’autre part le gouvernement prohibe leur destruction et s’apprête à contrôler et sanctionner ceux qui ne s’y conforment pas. Enfin, bien sûr, l’attente du consommateur est de plus en plus importante en matière de transparence et de responsabilité sociale et environnementale des entreprises dont il achète les produits.

🔍 Focus sur les obligations légales, les exceptions et les particularités fiscales liées à la gestion des invendus non-alimentaires.

💡 Et notre éclairage sur les impacts de la loi, des pistes pour valoriser efficacement ces surplus, appuyées d’un exemple concret.

Quelles obligations pour valoriser les surplus non alimentaires ?

Concrètement, l’interdiction de la destruction et la gestion des invendus non alimentaires riment avec une obligation de diriger ces produits vers une filière de valorisation. Pour ce faire, les opérateurs disposent de trois options afin de se mettre en conformité : 

  • En premier lieu, le réemploi des produits. Autrement dit, les utiliser sans en changer l’usage initial. Par exemple, en donnant des vêtements à des associations caritatives ou entreprises solidaires d’utilité sociale (ESUS) qui vont les distribuer à des personnes en situation de précarité pour se vêtir.
  • En second lieu, réutiliser ces produits comme mentionné à l’article 35 de la loi AGEC. La différence avec le réemploi : dans ce cas de figure, les produits sont utilisés après avoir été contrôlés, nettoyés, voire réparés dans certains cas. 
  • Le dernier recours consiste à recycler les produits. Le recyclage implique un coût environnemental, humain et économique plus lourd que le réemploi ou la réutilisation, mais demeure un moindre mal. Il reste naturellement plus vertueux que la mise en enfouissement ou en incinération, c’est pourquoi il leur est préféré.

Quelles sont les exceptions, et les particularités fiscales ?

Il existe une exception à la hiérarchisation des canaux de valorisation précédemment mentionnée : elle concerne les produits d’hygiène et de puériculture tels que les shampoings, gels douches, crèmes solaires, couches ou dentifrice. Pour ces produits le réemploi est obligatoire et surtout la seule option qui s’offre aux professionnels.

Tous les produits non alimentaires neufs sont concernés par l’interdiction de destruction, à l’exception des produits périssables ou dangereux pour l’environnement et la santé humaine.

Il est possible de remettre sans frais des invendus non-alimentaires à un éco-organisme agréé pour leur gestion, si les produits invendus soumis à un principe de Responsabilité Élargie du Producteur (REP) ont fait l’objet de trois refus de don. Pour cela, la contribution financière correspondant à ces produits doit avoir été versée lors de leur mise sur le marché.

Pour rappel, le don des produits non-alimentaires, comme pour l’alimentaire, peut donner lieu à une réduction fiscale soumise à condition, pouvant avoir un impact financier positif pour l’entreprise. Notons que si le bien est totalement amorti, le don de celui-ci n’ouvre pas droit à réduction d’impôt pour l’entreprise donatrice.

Un décret rend obligatoire la déclaration à l’administration fiscale du montant et de la date des dons et versements, pour les entreprises qui effectuent au cours d’un exercice plus de 10 000 euros de dons et versements ouvrant droit à la réduction d’impôt. L’identité des bénéficiaires (nom de l’association, adresse, numéro RNA, numéro SIREN) et, le cas échéant, la valeur des biens et services reçus, directement ou indirectement en contrepartie, devront également être déclarées.

Quelles sanctions en cas de manquement aux obligations de gestion des invendus non alimentaires neufs ?

En cas de non-respect des recommandations de la loi AGEC, un contrevenant s’expose à une amende administrative dont le montant peut aller jusqu’à 3 000 € s’il s’agit d’une personne physique, et 15 000 € pour une personne morale. En application de l’article L. 522-6 du code de la consommation, la décision peut même être publiée aux frais de la personne sanctionnée.

Quels sont les impacts attendus de la loi AGEC et les solutions pour répondre aux obligations ?

Réalisée par l’ADEME, en coopération avec l’Agence du Don en Nature (ADN), l’association Dons Solidaires, Phenix, le cabinet In Extenso, et le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie, dit Crédoc, une étude s’intéresse au gaspillage non alimentaire dans l’hexagone. Il s’agit de L’étude des Gisements et des causes des invendus non alimentaires et de leurs voies d’écoulement, publiée en novembre 2021. Elle identifie les quatre principaux impacts de la loi AGEC pour les acteurs non-alimentaires :

  • Augmentation du volume de produits donnés
  • Hétérogénéité des dons et de leur qualité
  • Développement de dons de petits volumes et complexification des schémas logistiques
  • Émergence de nouveaux acteurs pour faciliter l’intermédiation des dons de produits non alimentaires. Cela avait déjà été le cas avec la loi Garot pour le secteur des invendus alimentaires.

Les solutions recommandées

Pour répondre aux obligations de non destruction, l’étude propose une série de recommandations, parmi lesquelles : améliorer le suivi des invendus et de leur devenir, ou encore s’inspirer des retours d’expériences positifs sur l’alimentaire.

Basée sur une vaste enquête quantitative et des entretiens qualitatifs auprès d’acteurs ciblés, l’étude met en évidence que les obligations légales en termes de non destruction des produits non-alimentaires, ainsi que les conditions fiscales, juridiques et réglementaires de la mise en place du don vers les associations sont très peu connues des acteurs professionnels.

Certaines filières et entreprises ont anticipé cette valorisation avant la promulgation de la loi en 2020 et mis en place des solutions qui portent leurs fruits. C’est le cas de Pierre Fabre qui a mis en place un modèle de gestion des invendus efficace, que Phenix a accompagné dans sa démarche de don. L’objectif ? Donner plus et donner mieux.

« Nous tenions à être pionniers dans la mise en œuvre de la loi AGEC. Phenix, avec qui nous collaborons depuis 4 ans, nous apporte la garantie d’une parfaite traçabilité. Il est en effet essentiel que nos donations bénéficient exclusivement à des familles ou à des personnes isolées en situation d’exclusion. »

a déclaré Séverine Roullet-Furnemont, directrice RSE et développement durable au sein de la direction Green Mission Pierre Fabre.

« En anticipation de la loi AGEC, le groupe Pierre Fabre met tout en œuvre pour optimiser les donations d’invendus. Un travail avec nos sites de production et de distribution est en cours afin de pouvoir établir des process automatiques dans la gestion des retours produits et leur acheminement vers Phénix pour une répartition optimale auprès des associations demandeuses »

déclare Florence Guillaume, directrice Green Mission Pierre Fabre

Retrouvez le partage d’expérience de Séverine Roullet-Furnemont Directrice RSE Développement Durable Green Mission chez Pierre Fabre.

*Le dispositif des Responsabilité élargi du producteur (REP) a pour objectif d’agir sur l’ensemble du cycle de vie des produits : l’écoconception des produits, la prévention des déchets, l’allongement de la durée d’usage, la gestion de fin de vie.

**liste fixée par le décret N° 2020-1724 du 28 décembre 2020