Tout est parti du terrain ! Utilisée par des Epiceries Vrac, l’application Phenix a permis aux commerçants de vendre à petit prix des invendus et de limiter leurs pertes. Cette expérience suivie sur plusieurs mois a conduit l’association Réseau Vrac et Phenix à sceller un partenariat pour promouvoir ensemble les bonnes pratiques anti-gaspi bénéfiques aux acteurs de la filière vrac. Un objectif en adéquation avec les valeurs historiques de Réseau Vrac.

Entretien croisé avec Chloé Liard Chargée de développement et projets chez Réseau Vrac et Solène Barbier Business Developer Senior chez Phenix.

Démocratiser le vrac tout en veillant à la qualité des pratiques

L’association Réseau Vrac a été créée en 2016 par Célia Rennesson en association avec des professionnels de la filière vrac. Avec un objectif central : démocratiser la pratique du vrac et contribuer à structurer la filière et son offre. Désormais Réseau Vrac accompagne 1900 adhérents fournisseurs, commerçants spécialisés ou ayant un rayon vrac, ou encore des porteurs de projets.

🎤 Chloé Liard Chargée de développement et projets chez Réseau Vrac : “Depuis le début, notre cheval de bataille est que tous les commerces vrac qui ouvrent appliquent les bonnes pratiques d’hygiène et la réglementation de la vente en vrac. Nous accompagnons donc les professionnels par des formations, une connaissance juridique poussée, des supports tels que des études ou l’organisation du Salon Vrac. La dimension environnementale avec la réduction du gaspillage sont des valeurs fortes dans le vrac, on pense souvent à la réduction d’emballage mais le gaspillage alimentaire est souvent la seconde raison. S’allier avec une structure comme Phenix qui a pour cœur de cible cette problématique est enrichissant ”

Le Vrac est fortement associé à la notion de réduction des déchets grâce au fait par exemple de pouvoir réutiliser son contenant. Se servir à la juste quantité selon le besoin du consommateur peut conduire à une réduction du gaspillage alimentaire côté consommateur. Mais il reste parfois des invendus en magasins, comment lutter alors contre le gaspillage alimentaire en magasin ?

🎤 Solène Barbier Business Developer Senior chez Phenix : Tracer les invendus et prendre conscience des pertes qui pourraient être sauvées est la première étape vers une démarche anti-gaspi. Réseau Vrac a un rôle déterminant dans la filière, nous avons un ADN commun, l’envie d’aller vers une alimentation saine, écologique et solidaire. Les épiceries vrac ont la volonté de réduire leurs emballages. Nous sommes heureux de leur apporter notre expertise anti-gaspi en cohérence avec leurs objectifs. Souvent la première réaction des commerçants est de se dire qu’il n’y a pas de pertes en vrac, car les dates sont longues et les quantités semblent faibles. Puis ils se disent “en effet sur telle référence j’ai eu un souci, ou avant une fermeture pour vacances je n’ai pas pu écouler des produits”… Nous leur apportons des solutions. »

Une application anti-gaspi et un accompagnement adapté au vrac

L’application mobile Phenix permet de vendre à un prix réduit les invendus : les fonds de silo, les biscuits un peu cassés dans les bacs à pelles libre service… pour éviter qu’ils ne soient jetés. Cela permet aussi au commerçant de retirer un chiffre d’affaires supplémentaire. Chloé Liard confie être convaincue par la démarche.

L’application mobile Phenix permet de vendre à prix réduit les invendus : les fonds de silos, les biscuits un peu cassés… pour éviter qu’ils ne soient jetés. Cela permet aussi au commerçant de retirer un chiffre d’affaires supplémentaire. Chloé Liard confie être convaincue par la démarche. 🎤 “Je n’étais pas sûre à 100% que ça fonctionnerait, j’imaginais que c’était surtout le frais et les fruits et légumes qui généraient des volumes de perte importants… mais dans les données remontées par Phenix il y a beaucoup de fonds de silos, de biscuits abîmés identifiés comme source de gaspillage… cela a permis d’identifier des typologies pour amener la filière à être plus vertueuse et travailler sur ces points de pertes : pourquoi pas travailler les recettes de biscuits pour qu’ils soient plus adaptés à la vente en vrac. Sur le point de vente, les pratiques peuvent être optimisées concernant le gaspillage.”

En savoir plus sur l’application ant-gaspi

Phenix a pu établir une typologie des produits vrac qui cassent le plus, basée sur l’accompagnement des magasins vrac sur le terrain. 🎤 “On retrouve sans surprise les fruits et légumes qui perdent leur fraîcheur, les produits frais arrivant à date, mais aussi certaines références vrac qui ne tournent pas bien ” nous explique Solène Barbier. « Viennent ensuite les fins de silos “difficiles à vendre” car deux lots différents d’un même produit ne peuvent pas être mélangés. En réalisant des sachets anti-gaspi via l’application, cela permet de vider et désinfecter le silo lorsque le commerçant a le temps de s’en occuper. Cette fin de silo n’est pas toujours valorisée. Également, les bacs à pelle contenant par exemple des biscuits peuvent occasionner de la casse lors de leur manipulation… Je pense également aux dates courtes, les DDM livrées un peu tard, ou encore les œufs qui doivent être retirés de la vente à J-7. L’application va permettre une rotation des stocks optimale et une valorisation des pertes. »

Lors du lancement de l’application en magasin Phenix apporte un accompagnement sur les bonnes pratiques avec des recommandations sur les horaires de publication des paniers anti-gaspi, des suggestions sur les taux de réduction, la composition des paniers, et fait un rappel sur la réglementation et le contrôle des dates… 

Alors que 37% de la population française consomme du vrac *, l’équipe de Réseau Vrac considère qu’il y a un besoin d’améliorer l’équipement de vente pour lever les freins du vrac, améliorer le parcours d’achat en magasin et le simplifier pour que cet achat ne reste pas exceptionnel à une frange de la population sensibilisée. Chloé Liard précise : 🎤 ”Une dimension intéressante de l’application Phenix est aussi l’apport de clientèle, le trafic, car beaucoup de personnes n’osent pas entrer dans un magasin vrac, ayant l’impression que ce n’est pas pour eux. Aller au vrac, passer la porte du commerce, faire le tour du magasin, ça peut convertir des consommateurs… c’est une bonne manière de sensibiliser d’autres publics.”

Œuvrer pour faire bouger les lignes

Réseau Vrac a réalisé des actions de lobbying dans le cadre de plusieurs lois en participant à des groupes de travail, dans le but de contribuer à développer le marché vrac. Chloé Liard revient pour nous sur ces étapes clés : 🎤 “ Nous avons contribué à la loi Anti Gaspillage pour une économie circulaire AGEC dans laquelle nous avons réussi à faire passer une définition du vrac désormais inscrite dans le texte et la possibilité pour le consommateur de se servir de son propre contenant dans les commerces. Autre exemple, la loi Climat et résilience reprenant une proposition de la Convention citoyenne d’intégrer la vente en vrac dans 20% des rayons des supermarchés de 400m2 et plus d’ici 2030, ce qui est une bonne chose pour démocratiser la vente en vrac ».

Plusieurs initiatives ont également vu le jour pour faire un état des lieux des bénéfices et impacts du vrac précise-t-elle 🎤 “ Nous avons participé à une étude de l’ADEME** sur le cycle de vie des produits dans la pratique du vrac. Nous constatons que si une bonne conduite des rayons et une sensibilisation des consommateurs est réalisée, alors ça marche […] Mais c’est difficile à évaluer et quantifier. Nous souhaitons réaliser une étude socio comportementale pour voir ce qui peut changer entre un consommateur vrac et non vrac. L’intuition que l’on a aujourd’hui c’est que cette pratique contribue à une prise de conscience plus large.”

Quantifier et qualifier les pertes dans le vrac est un grand chantier et un enjeu majeur pour l’avenir souligne Solène Barbier  🎤 “ Notre première intention est de sensibiliser les professionnels, leur montrer que le gaspillage est intrinsèque à tout métier de bouche. Lever le tabou des pertes dans le vrac sensibiliser à la fois commerce et consommateurs. Même si les pertes sont minimes, on peut les valoriser et simplifier le quotidien du commerçant. »

En 2030 les commerces de plus de 400m2 auront l’obligation de proposer 20% de leurs rayons en vrac***. Un enjeux pour l’ensemble de la filière rappelle Chloé Liard : 🎤 ” Cela va entraîner un saut, créer des débouchés pour les équipementiers, des marques s’y mettront car il y aura un marché… mais cela ne doit pas être fait n’importe comment. La crise covid a rebattu les cartes de la consommation, les commerces vrac ont été touchés avec une baisse de la fréquentation. Comment attirer de nouveau les consommateurs vers ces commerces, les produits locaux, et de bonne qualité… ? Nous voulons aider ces commerces.” 

Recevoir plus d’information

*Source Nielsen Panel View Décembre 2018, plus de détail dans cet article

**Etude « La vente en vrac pratiques et perspectives », disponible sur la librairie de l’ADEME

***Loi climat et résilience disponible ici

Photo: Phenix – épicerie vrac Grain Flori 7 Rue Mathurin Brissonneau, 44100 Nantes